SOS Rétinite, soutien du diagnostic moléculaire et de la recherche sur les rétinites pigmentaires depuis 25 ans, finance la mise en place d’une plateforme d’exploration fonctionnelle unique en France : la plateforme ZebraSens.
La rétinite pigmentaire (RP) est une affection génétique qui entraine chez le patient une perte progressive de la vue conduisant à une cécité. L’association SOS rétinite, fondée par Madame Monique Roux en 1986 et reconnue d’utilité publique depuis 2004, participe aux avancées en ophtalmologie en étant le lien entre médecins, patients et chercheurs mais aussi en étant un soutien financier majeur dans la mise en place et le développement de projets ciblés.
Un patient atteint de RP suit un parcours de soin qui inclut un suivi médical sous la forme de consultations ophtalmologiques spécialisées, et le cas échéant d’un suivi en conseil génétique associé à une démarche de diagnostic moléculaire. Le diagnostic moléculaire est une discipline qui vise à identifier dans l’ADN du patient les causes de la pathologie. Les rétinites pigmentaires et les syndromes associés (lorsque d’autres symptômes que visuels se manifestent, tel le syndrome de Usher qui associe surdité et RP, et qui concerne 20% des patients atteints de RP) sont des maladies dites génétiquement hétérogènes, c’est à dire que les causes moléculaires ne sont pas dues à des atteintes d’un seul gène, comme par exemple dans le cas de la mucoviscidose. Dans le cas des rétinites pigmentaires, des dizaines de gènes sont actuellement décrits comme pouvant être responsables de la pathologie. Parmi ces gènes, 10 sont connus pour être responsables du syndrome de Usher qui associe une surdité congénitale et une rétinite pigmentaire qui apparaît vers l’âge de 10-20 ans. Certains des gènes Usher sont par ailleurs associés à des variabilités phénotypiques extrêmes allant d’une forme non syndromique à une forme syndromique (associant plusieurs symptômes).
Le diagnostic moléculaire des rétinites pigmentaires et des pathologies neurosensorielles dans leur ensemble est une activité d’expertise. Il est réalisé dans un laboratoire hospitalier autorisé par le ministère dans lequel les professionnels doivent détenir un agrément individuel pour pratiquer des examens de caractéristiques génétiques.
A Montpellier, ce diagnostic est réalisé au sein du CHU dans le laboratoire de génétique moléculaire, actuellement dirigé par le Pr Michel Koenig et fondé en 1989 par le Pr Mireille Claustres. La recherche du génotype pathogène (les mutations causales dans un gène) se fait à partir d’un simple prélèvement de sang. Le laboratoire de génétique moléculaire du CHU de Montpellier est spécialisé depuis 15 ans dans le diagnostic d’expertise du syndrome de Usher (https://neuro-2.iurc.montp.inserm.fr/usher). Cette activité a pu se développer et acquérir une notoriété internationale (28 publications dans la littérature scientifique internationale sur le syndrome de Usher depuis 2005 pour le Dr Anne-Françoise Roux, responsable de l’activité au laboratoire) grâce notamment au soutien indéfectible de l’association SOS rétinite. En effet, si l’activité de diagnostic est prise en charge financièrement par des budgets ciblés du ministère et du CHU, toute mise en place doit se faire par des budgets recherche avant transfert dans le secteur diagnostic.
SOS Rétinite a ainsi permis la mise en place du diagnostic d’expertise sous forme de différents types de financements : 4 bourses pour des durées de 1 à 3 ans, octroyées à de jeunes chercheurs qui ont été par la suite recrutés par le CHU pour poursuivre leurs activités; 3 bourses d’étudiants en thèse qui ont pu approfondir des analyses moléculaires spécifiques sur plusieurs gènes; l’achat d’un robot Beckman pour la préparation des échantillons avant séquençage et dont l’arrivée a permis un gain de temps important par semi-automatisation de nombreuses étapes d’analyse de l’ADN.
Ainsi, l’association a également permis d’initier un nombre important de projets comme la mise en place de bases de données génétiques LSDBs concernant les 10 gènes Usher recensant la totalité des mutations rapportées dans la littérature internationale. Ce projet, initié en 2005, est toujours actif et reconnu comme la référence du genre (www.lovd.nl/CDH23). Il inclut plusieurs milliers de mutations recensées dans des dizaines de publications ou soumis par des collaborateurs venant de 17 pays différents. Plusieurs projets
focalisés sur la recherche des altérations de l’épissage (mécanisme permettant le passage de l’information génétique (ADN) vers les effecteurs cellulaires (les protéines) par l’intermédiaire d’un type de molécule particulier, l’ARN) ont été également été financés. Des mutations de l’ADN peuvent avoir des conséquences imprévues sur l’ARN qui auront des conséquences sur les protéines qui en sont issues. Certains de ces travaux ont permis d’identifier pour la première fois des mutations situées dans des régions difficilement explorables du gène USH2A et pour lesquelles, du fait de leur spécificité, des corrections (thérapies) sont envisageables à moyen terme. En effet, ces mutations dites « introniques profondes » vont entrainer l’insertion d’un petit fragment d’ADN reconnu comme un « pseudo-exon ». L’utilisation de petites molécules appelées AON ou antisens oligonucléotides peuvent inhiber la reconnaissance de ces pseudo-exons et rétablir un ARM messager normal. Ainsi, le laboratoire a notamment collaboré sur un projet montrant la faisabilité in vitro (en laboratoire) de ces corrections.
En 2017 le groupe du Dr Anne-Françoise Roux a mis en place une collaboration avec deux autres équipes de recherche pour élaborer un projet à nouveau particulièrement ambitieux : la plateforme ZebraSens.
En effet, l’offre diagnostique actuelle du secteur neurosensoriel permet de prendre en charge des patients atteints de rétinite pigmentaire non syndromique, du syndrome de Usher (rétinite pigmentaire et déficience auditive) et de surdité neurosensorielle. Le recrutement des patients est national et se fait en lien avec plusieurs centres de référence de maladies rares de la filière SENSGENE dont le centre des affections sensorielles rares de Montpellier (Pr. Christian Hamel, service ophtalmologie, d’une part, et Pr. Michel Mondain et Dr. Catherine Blanchet, service ORL, d’autre part). A titre d’exemple, en 2016, plus de 500 patients et apparentés ont été adressés au laboratoire pour analyse moléculaire. L’utilisation du séquençage haut-débit (nouvelle approche de séquençage qui permet de multiplier les débits par plusieurs millions) trouve toute son utilité dans l’analyse des pathologies neurosensorielles qui sont génétiquement et phénotypiquement (dans leur expression) très hétérogènes. Si l’offre diagnostique en est considérablement améliorée, le séquençage simultané de dizaines de gènes identifie de nombreux variants de signification clinique inconnue. En effet, chaque individu dans son génome (la globalité de son ADN) est porteur de millions de variations de séquences (différences par rapport à la séquence humaine de référence), dont la plupart n’ont pas d’impact cliniquement décelable. L’analyse d’une infime partie de ce génome (les quelques dizaines de gènes d’intérêt pour ses pathologies) révèle en moyenne un millier de variants par individu. La classification de ces variants (pathogène/non pathogène) représente un véritable challenge et est cruciale pour identifier de façon certaine le gène impliqué dans la pathologie. Dans un souci de diagnostic exhaustif, le secteur neurosensoriel développe une recherche appliquée à l’interprétation de ces variants. En effet, il est crucial de pouvoir définir non seulement si le variant identifié est impliqué dans la pathologie mais aussi si ce variant va entrainer un effet délétère au niveau de l’audition et/ou de la vision. Par exemple, à ce jour, lorsque l’on identifie un nouveau variant dans le gène MYO7A chez un jeune patient qui présente une surdité a priori isolée, on ne sait pas toujours prédire si la surdité va être non syndromique (comme seul symptôme) ou si un syndrome de Usher va se développer. Le but est donc d’analyser des variants bien spécifiques dans un modèle animal afin de définir les conséquences délétères associées à la présence de l’anomalie.
Cette recherche appliquée va utiliser le poisson zèbre ou zebrafish qui représente un modèle de choix pour étudier la fonction des gènes responsables de déficiences visuelles et auditives chez l’Homme.
Le poisson zèbre mesure 2-5 cms et les embryons ainsi que les larves sont transparents ce qui permet de visualiser très facilement les différents organes, notamment ceux impliqués dans l’audition et la vision (il faut savoir que les systèmes visuel et auditif de ces poissons se développent rapidement et sont fonctionnels 5 jours après fécondation). Par ailleurs, les mécanismes de développement et les compositions anatomiques et fonctionnelles des organes sensoriels sont très conservés entre le zebrafish et l’Homme. Ainsi, la rétine du
zebrafish présente l’arrangement classique rencontré chez les vertébrés avec des photorécepteurs, des neurones et des cellules gliales mais aussi des cellules de l’épithélium pigmentaire et une vascularisation rétinienne. Bien que la rétine de ce poisson ne dispose pas d’une macula et présente, au lieu de cela, un arrangement mosaïque hautement organisé de photorécepteurs, elle est, comme chez l’Homme, riche en cônes et optimisée pour l’activité diurne. De même, malgré l’absence de cochlée, la structure de l’oreille interne du zebrafish ressemble à celle des autres vertébrés et l’organisation et la morphologie des cellules ciliées sont également comparables à d’autres vertébrés. Enfin, des tests comportementaux ont été développés pour la fonction visuelle qui soutiennent l’évaluation rapide des fonctions de la rétine et de la cochlée.
La mise en place de la plateforme ZebraSens, soutenue par SOS rétinite, est née de la rencontre de trois équipes Montpelliéraines qui s’intéressent depuis de nombreuses années aux pathologies neurodégénératives et neurosensorielles : Le groupe du Dr Anne-Françoise Roux au CHU de Montpellier, le groupe du Dr Benjamin Delprat à l’Institut des Neurosciences de Montpellier (INM) et le groupe du Dr Mireille Rossel au sein du laboratoire MMDN-INSERM U1198, situé sur le campus de l’université de Montpellier.
Cette plateforme ZebraSens,
propose de regrouper sur le même site et à proximité de l’animalerie de zebrafish de l’Université de Montpellier, des équipements de pointe permettant l’analyse de la vision, de l’audition et du comportement locomoteur du zebrafish.
La vision sera évaluée par la Visiobox, capable de mesurer la réponse OKR (OptoKinetic Response test). Ce test évalue l’acuité visuelle des zebrafish dans un environnement sans stress et de façon automatisée. Ce test est réalisé dans une Visiobox. L’acuité visuelle mesurée par OKR implique le mouvement des yeux des poissons. Ce mouvement est généré par le défilement de lignes blanches et noires à intervalle régulier et fortement contrastées. Il est possible de diminuer la taille ou le contraste des bandes noires pour augmenter la difficulté et évaluer avec précision l’acuité visuelle d’un poisson sauvage ou mutant. Il est possible de mesurer l’acuité visuelle de 8 poissons en même temps. L’audition sera analysée grâce à la Zebrabox Fast disposant d’un module vibratoire. Cette Zebrabox Fast est capable de mesurer la courbure que fait le poisson suite à une stimulation sonore de fréquence et d’intensité choisie. Cette courbure est caractéristique du comportement d’évitement d’un prédateur et renseigne sur l’acuité auditive du poisson. Enfin, le comportement locomoteur sera étudié
avec la Zebrabox classique. Dans ce test, les poissons sont laissés dans leur aquarium et sont vidéotraqués. Il est ainsi possible de déterminer la distance parcourue, la position, les phases d’arrêt et d’activité de chaque poisson. L’ensemble de ces équipements d’une valeur de 100k€, représente une plateforme d’exploration fonctionnelle sensorimotrice unique en France.
Cette plateforme va permettre le développement de nouvelles approches aussi bien pour cribler en haut débit des molécules à intérêt thérapeutique dans des modèles précliniques que pour l’analyse des gènes (et de leurs variants) responsables de pathologies rétiniennes et de façon plus générale des gènes impliqués dans les pathologies neurosensorielles.
Groupe Neurosensoriel
Leader :
Présidente : Dr. Anne-Françoise ROUX |
Madame Monique ROUX :
Chevalier de la Légion d’Honneur
Officier dans l’Ordre National du Mérite
Médaille de l’Assemblée nationaleSOS Rétinite France
Association Reconnue d’Utilité Publique
276 Impasse de la Baume
34000 Montpellier
sosret@gmail.com
www.sosretinite.com |
Les équipes de la plateforme ZebraSens
Anne-Françoise ROUX PharmD, PhD, HDR
Groupe Neurosensoriel
Laboratoire de Génétique Moléculaire, CHU Montpellier
EA7402 Université Montpellier
https://neuro-2.iurc.montp.inserm.fr/ |
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Mireille ROSSEL, PhD, HDR
Mécanismes Moléculaires dans les Démences Neurodégénératives
Inserm U1198
https://mmdn.umontpellier.fr/ |
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Benjamin DELPRAT, PhD, HDR
Institut des Neurosciences de Montpellier
Inserm U1051, Université de Montpellier
http://www.inmfrance.com/ |
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Télécharger le PDF de la publication LABO AF ROUX RECHERCHE 04 MAI 2017